29 mai 2008
Rose ou narcisse ?
Encore du Matisse, quelque chose comme la sérénité, une rose sur la poitrine que l’on sent s’ouvrir dans son coeur, juste pour quelques informations sans intérêt.
Le site Myspace des 400 coups France a donné à chacun de ses auteurs un questionnaire, afin que leurs lecteurs les connaissent mieux. Je me suis prêtée au jeu.
Et samedi après-midi, je serai à Rueil-Malmaison, salle atrium. L’assemblée générale de l’association de narcolepsie-cataplexie y aura lieu. On m’y a invitée pour dédicacer La fille qui dort, ce que je ferai avec grand plaisir.
Il n’y a pas longtemps, quelqu’un m’a demandé, très dubitatif : « mais ça te plaît, ça, dédicacer, les salons du livre ? Ce n’est pas un peu superficiel, narcissique ? »
J’ai répondu : oui ça me plaît. Oui c’est un peu narcissique. Et en même temps pas tant que ça (il est rare qu’on nous regarde avec une admiration éperdue). Et souvent, très souvent, j’y fais des rencontres pas superficielles du tout.
Et parfois, simplement, les échanges de sourires, simplement ça. Les regards, aussi. Les gens, les enfants…
26 mai 2008
Le bonheur des poissons
Il paraît qu’un poisson a une mémoire qui ne dépasse pas les trois secondes.
Ca me rassure infiniment quant à leur aptitude au bonheur.
Ainsi, celui-ci dans son bocal sera constamment émerveillé par le paysage qui s’offre à lui après un tour d’aquarium.

(Matisse)
21 mai 2008
Une forme d’égocentrisme
Où serai-je le 23 février 2012 ?
Pourquoi le 23 février 2012 ?
A quoi ressembleront mes enfants à 20 ans ?
Qui a pu inventer l’énormité de l’expression passe-temps ?
Et pire : gagner sa vie ?
Comment peindrais-je si je peignais ?
Serais-je la même si j’étais née à Tombouctou ?
Ou à Los Angeles ?
Y a-t-il quelqu’un qui se promène sur ces collines que je vois au loin ?
Pense-t-on à moi en ce moment ?
Combien de personnes dans ma ville font l’amour là, maintenant ?
Combien d’autres meurent ?
Et comment ?
Combien de personnes dans le monde sont nées exactement en même temps que moi ?
Me ressemblent-elles ?
En ai-je croisé une sans le savoir ?
Chuchotement : quelqu’un m’aime-t-il en secret ?
Quelle est la durée de vie d’une coccinelle ?
Au-dessus de qui ce nuage s’effilochera-t-il à jamais ?
Qui a inventé l’expression mal au coeur, alors que ce n’est jamais vraiment là qu’on a mal ?
Pourquoi le mal de ventre n’est pas plus romantique ? (quand j’aime, j’ai mal au ventre)
Les éléphants s’embrassent-ils avec leur bouche ou leur trompe ?
Et les mouches ?
Qui dirige le monde ?
Si j’étais blonde…
Ou rousse…
Serais-je la même ?
Si je mesurais 1mètre 80 ?
Si j’étais une fille de ?
Ou la femme de ?
Et si j’écrivais pour la gloire ?
Ou pour l’argent ? (C’est pareil ?)
Aurais-je dû faire actrice ?
Ou présentatrice du 20 heures ?
Ou dame pipi ?
Pourquoi est-ce que j’aime les fenêtres ouvertes ?
Et pas m’occuper d’un jardin ?
Les saules pleureurs sont-ils malheureux ?
Existe-t-il encore des femmes qui repassent leurs petites culottes ?
Ou encore les torchons ?
Faut-il dire lombric ou ver de terre ?
Flûte ou verre ?
Navet ou film amer ?
Si je nageais cent jours au départ de Sète, quelle serait ma latitude ?
Ma longitude ?
Si je n’aimais pas le chocolat, serais-je la même ?
Et si j’aimais les endives cuites ?
Faut-il obligatoirement savoir ce que l’on aime ?
Ce que l’on déteste ?
Peut-on détester ?
Même s’il s’agit d’un légume (le pauvre) ?
Existons-nous ou faisons-nous partie d’un vaste rêve ?
Est-ce moi qui le rêve ?
Ou toi ?
Ou quelqu’un que je ne connais pas ?
D’une autre galaxie peut-être…
Mais suis-je bête, celle-ci n’existe pas.
Si c’est un rêve.
….
20 mai 2008
La petite fille au chat noir

(Matisse)
17 mai 2008
Sphères
Je sais pas ce qui m’a pris, un moment d’égarement sans doute, ou un élan de conformisme blogoboulesque, soudain c’était plus fort que moi : mais comment pouvais-je vivre sans être présente sur Myspace ? Ca me faisait de l’oeil depuis un moment. De plus en plus, les bédéistes blogueurs que j’aime visiter annonçaient qu’ils s’y mettaient. Moi qui croyais que ce n’était que pour les chanteurs… Je pouvais encore croire qu’il s’agissait d’un autre monde, lorsqu’une maison d’édition, il y a quelques mois, y annonça son apparition. Pouf, édition sur myspace. J’y plongeai un orteil.
J’étais méfiante. Faut dire, j’ai déjà essayé Facebook. Rien compris. Ni la finalité, ni l’enjeu. Pourtant, ça avait l’air de rendre plein de gens enthousiastes. Certains y jouent aux échecs avec des adversaires de tous les pays, mais la plupart y partagent des vidéos jugées désopilantes, mais qui ont certainement été créées par le Medef pour rendre ensuite le cerveau disponible pour le travail. Fessebouc, c’est le règne des cadres tellement cadrés qu’ils fuient dans ce qu’ils croient le summum du hors-cadre, mais en réalité aussi décalé que lorsque leur pot à crayon bascule sur le bureau du voisin. Fessebouc, ce sont des gens policés qui frappent à votre porte : bonjour, heu, excusez-moi de vous déranger, n’aurions-nous pas partagé le même banc de maternelle ? A moins que ce ne fut à la fac de sciences appliquées à la bonne révolution de la terre sans déborder ?
Alors myspace, c’est tout autre chose.
Sur myspace, déjà, on s’expose (sur fessebouc, on tente plutôt d’oublier qui on est). Enfin, on est libre, et c’est assez agréable, de bidouiller son propre petit code html afin d’y montrer ce qu’on a fait de fantastique : chanson, peinture, arts en tout genre, et depuis peu, donc, romans.
Grosse différence assez choquante : sur myspace, l’administrateur te tutoie, et te parle comme si tu avais douze ans, mon pote, à donf complet. Assez déstabilisant, mais on peut tenter de passer outre.
J’ai bataillé avec html pour tenter de cacher les infos les plus indiscrètes qui y apparaissent obligatoirement (habitudes sexuelles, etc…). Si quelqu’un peut me trouver le tuyau pour enlever mon âge, ça m’arrangerait. Je ne me résous pas à faire comme beaucoup (de filles surtout), qui brandissent 99 ans en étendard, pied de nez un peu piteux face à la machine. J’aurais trop peur qu’on le croie. Je préfère afficher sans honte mes vingt-cinq ans, hum.
Passons outre également l’interface préhistorique (qui se cache donc sous un langage djeune), qui ne supporte qu’Internet explorer.
La première grosse surprise apparaît au premier message : djingball veut devenir ton ami. Approuves-tu ?
Tiens, tiens. Quand on est passé par fessebouc, on cherche automatiquement dans sa mémoire : quelle classe ai-je partagé avec Djingball ? On va voir son profil, et c’est alors la panique la plus totale. Ni le lieu, ni l’âge, ni l’apparence de ce Djingball ne nous rappelle quoi que ce soit. On croit être tombé dans une autre dimension, lorsqu’on se rappelle qu’on est dans la Blogoboule. On calme les battements affolés de son coeur, et on reprend pied dans le virtuel. Bien, calmons-nous. Que nous veut Djingball ? Devenir notre ami ?
Certainement pas. On va approuver quand même, pour les besoins de l’expérience. Djingball pourra ainsi laisser des commentaires sur ma page myspace, et ça lui fera une infime chance en plus qu’un Internaute égaré clique sur son profil afin de voir ce qu’il fait de fantastique.
Moi, j’ai désormais 1 ami, et lui, il en a désormais 1458.
Tous mes concepts de l’amitié sont bouleversés. C’est finalement encore plus schizophrène que fessebouc. Je le deviens très vite. Faut dire, je me sens profondément seule, soudain : je suis la seule myspacienne a n’avoir qu’un ami. Ah, ami, quelle bonté d’être venue ainsi me tirer de ma solitude. Pour te remercier, je vais poser un commentaire sur ta page (et ptete qu’ainsi ça attirera d’autres amis). Tiens, voyons voir les amis des autres…
Oh, y’a du beau monde. Y’a des vrais gens, mais on peut aussi demander à devenir ami avec Tintin, Victor Hugo ou Jean-Luc Godard. Bon. Moi je demande à François Truffaut et Corto Maltese. Waouh, Corto accepte. 2 amis.
Amélie Nothomb ? Non, c’est son fan-club. Bizarrement, je ne trouve ni Charles Juliet, ni Pascal Quignard (par exemple). Tiens ça alors, Olivier Adam (vénéré par une fée clochette de ma connaissance). Là c’est vraiment lui. Olivier Adam, j’ai lu votre roman Falaises, voulez-vous devenir mon ami ? Incredible, il accepte. Je n’en reviens pas, me voilà amie avec Olivier Adam. Puis-je désormais lui écrire, l’inviter chez moi, m’inviter chez lui, partager une bouillabaisse ? Je me prends à rêver. De la même façon, je suis désormais l’amie de Lolita Séchan, mais elle je la connais vraiment, enfin un petit peu, je veux dire on a quand même un jour échangé deux commentaires internautiques, oui ou non ? Bon, alors.
La trombine d’Olivier Adam, de Lolita et de Corto sur ma page, ça en jette. Mais je ressens soudain un vide intersidéral.
La dépression me guette.
C’est ça la chute schizophrène. Quand Ange me tire la manche et demande, inquiet : maman ? Ah euh oui, qui ça ?
Je ne connais pas ces gens-là, et pourtant c’est écrit : j’ai 4 amis.
Vite, vite, je demande à une véritable amie d’y apparaître aussi. Ouf, merci Flavia. Un semblant de réalité me ramène vers… quoi ? La boule dont la révolution doit tourner autour du medef, heu, de facebook, non je veux dire du président, quoi j’ai encore faux, la nouvelle star ?
Un tourbillon de néant passe.
Je mets un long moment à me rappeler que l’essentiel est ailleurs (fond sonore idoine, vous savez la déjà vieille série TV la vérité est ailleurs ou je sais plus) : dans la persoboule.
Pour petites et grandes oreilles
Comme il dit.
Il dit aussi qu’il a mangé ses chaussures (moi j’en connais un autre : ils ont eu paraît-il des conversations de va-nu-pieds – mais je n’étais pas là, je ne peux le certifier).
Il est venu de Paris en bicyclette. Ici c’était l’une des dernières étapes avant Sète.
Hier soir il a chanté tout cela (Boucle d’or a adoré).
Les deux mangeurs de chaussures ont donc quand même enfilé des baskets (pour l’un, des tongs pour l’autre) ce matin, et l’un a accompagné l’autre jusqu’à Marseil…lan. Mais oui, faut suivre, la fin de l’histoire, ce sera à Sète, qu’on se le répète.
Il s’agit de David Sire.
Hier il n’avait pas son clown mais il a fait les bruitages et gestes tout seul comme un grand, et ça a plu aussi aux petits.
Prière de n’empailler que les bulles de savon, ça donne de jolies bulles d’oxygène.
14 mai 2008
Madame Manet
Berthe Morisot l’appelait affectueusement « la grosse Suzanne ».
Elle fut la seule capable d’apporter un équilibre à Edouard Manet, par son tempérament apaisant et souriant.
Il la représente ici en train d’écouter son fils Léon lui faisant la lecture.

Elle lui servit de modèle pour La nymphe surprise :

Son grand talent, reconnu par tous, était de jouer admirablement du piano. Elle put paraît-il apaiser les derniers jours de Baudelaire en lui jouant du Wagner :

Mais lorsque Degas, sous le charme également, entreprit de représenter le couple Manet, afin de leur offrir le tableau…
Manet fut interloqué par le visage de sa femme, si loin de l’image qu’il s’en faisait…

Alors, il découpa la toile.

08 mai 2008
Suivons le ballon rouge

(Klee)
Le perdre de vue ne sera pas grave. Il nous aura de toute façon mené vers des contours flous. La silhouette ne se laissera pas saisir, mais peu importe, elle nous regarde.

Emportant ce regard, nous repartirons dans un voyage jugé capricieux par beaucoup. On s’en moque. Le ballon rouge, lui, sait ce qu’il fait en se laissant chercher.

(Kandinsky)
Bien sûr, il est joueur. Il aime changer de couleur, brouiller les pistes.


(Klee)
Mais lui aussi nous regarde, intrigué par notre altérité.
Chacun de nous insaisissable.
07 mai 2008
Devenir
Ca commence comme devinette !
Voici quelques oeuvres de jeunesse, de peintres très connus. Devinerez-vous par qui a été peint chacun de ces tableaux ? (Bon les deux derniers sont signés, c’est juste pour le plaisir d’être surpris ! Et de toute façon, réponses à la fin de l’article.)







1. Dali : la fenêtre sur le rêve déjà plus grande que le sombre quotidien.
2. Gauguin (qui avait vraiment besoin de partir pour les îles !)
3. Kandinsky : étonnante, cette chanteuse, n’est-ce pas ?
4. Matisse : pour lui aussi, c’est ce que montre la fenêtre qui nous laisse deviner ce qu’il va devenir.
5. Miro : toile très étrange, ce portrait à rayures, cette estampe derrière et cette palette, cette couleur jaune… Très riche et déroutant.
6. Munch : une certaine mélancolie qui se retient encore.
7. Picasso : je l’aime décidément à tous ses âges.
Ce que je trouve fabuleux dans les tableaux de Dali, Matisse et même Picasso, c’est que c’est ce qui se passe par les fenêtres qui préfigure leurs oeuvres futures. Pour les autres, c’est ce qui se passe dans les motifs des vêtements, par exemple (ou dans un coin, timidement, comme cette palette de Miro !).
Comme si les plus grands artistes étaient ceux qui parvenaient à se détacher des contours, à les briser pour n’en garder que les détails les plus signifiants, et finir par leur faire une entière confiance, à ces détails qui vont permettre de faire deviner tout le reste.
Il faut dire que j’ai lu il y a peu « L’écrivain et la vie » de Virginia Woolf. Elle explique qu’à vouloir trop bien décrire la vie, un écrivain peut créer un texte agréable, certes, mais où le lecteur est noyé et ne parvient pas à être saisi par ce qui est important.
« L’écrivain a pour tâche de sélectionner un aspect et de faire en sorte qu’il en évoque vingt », finit-elle par énoncer.
Littérature et peinture sont sans doute beaucoup plus proches qu’on ne pourrait le penser…