Voilà, j’ai craqué, je n’ai pas pu m’en empêcher, j’ai acheté Sauveur et fils chez ma libraire d’en bas de chez moi (quasiment), pendant que mon fiston se jetait sur le 7e tome de Tom Gates. Parfois, on a besoin lui et moi de lectures a priori « faciles » (il sortait de Croc Blanc et moi de Houellebecq, on avait le droit). Eh bien ça m’a fait un bien fou de retrouver la plume de Marie-Aude Murail, après avoir il y a plusieurs années dévoré la série des Emilien puis des Nils Hazard, puis Simple, et puis Oh boy ; quels délices en tout genre ! J’ai retrouvé ce plaisir très grand et très simple, celui d’avoir juste envie de tourner les pages en espérant que cela ne se termine pas trop vite.
Et puis il n’est pas si « facile » que ça ce roman, en dépit de son style sans fioritures, sans mot compliqué, en toute humilité, sans effet de jambe, il est même très fin, avec des pépites d’intelligence au détour d’une phrase, d’un mot, d’une fin de chapitre élégante. Oui tenez voilà, l’élégance, c’est ça qui prime, une écriture aussi élégante que son héros Sauveur. Et puis Marie-Aude Murail est la seule auteure dite jeunesse que je connais qui parviens à faire évoluer un héros adulte très naturellement dans un roman qui s’adresse d’abord aux adolescents (voir les Nils Hazard), même si franchement, hein, les adultes, allez-y, c’est du tout public, vous n’aurez presque pas peur.
Presque pas parce qu’alors là, accrochez-vous, c’est une plongée soum soum (en immersion, langage ado) dans le monde de l’enfance et des ados, via leurs confessions au psy Sauveur. Et donc le mystère pour moi c’est : comment fait-elle donc, Marie-Aude Murail, pour parler de scarifications, d’envies de mourir, d’homophobie, de racisme, d’abus sexuels etc… sans qu’on ait soi-même l’envie de se pendre, mais au contraire juste l’envie de chanter et de crier son amour de la vie ? Bon certes, je vais plutôt bien en ce moment, mais quand même je me dis qu’elle n’y est pas pour rien et puis tiens, j’en profite : je lui dis merci (elle doit être comme Sauveur j’imagine et savoir accepter compliments et remerciements).
Et à mon avis voilà la magie des livres pour enfants et ados, on y est, Marie-Aude nous touche en cela en plein coeur, elle frappe juste car elle a trouvé le secret, peut-être bien malgré elle, qui sait ? En tout cas le secret c’est ça : parler de sujets forts, de la vie, de l’amour, de la mort, avec une justesse et une légèreté et un amour de la vie et un humour et une causticité et une fantaisie et un respect de l’enfance et de l’adolescence qui font qu’on a juste envie de grandir et de vivre (oui même moi qui ai fini de grandir j’ai eu envie de grandir – le premier qui dit vieillir… « je ferme ma gueule et je lui ouvre la porte », dixit Sauveur Saint-Yves).
Ah et puis pour finir je salue le fils Lazare si curieux, toute la galerie de personnages si attachants, et bien sûr le cochon d’In… Heu, le hamster de la couverture. Et vivement la saison 2 !