RENCONTRE / MISE À L’ÉCRIT / ATELIER D’ÉCRITURE menés par des écrivaines et écrivains

Chacune de ces interventions en milieu scolaire me semble très différente des deux autres, lorsqu’on est écrivaine ou écrivain ! Je vous donne mon point de vue…

POURQUOI CE POST ?

Parce que je trouve la confusion de plus en plus fréquente. On utilise le terme “atelier”, aujourd’hui, pour un peu tout et n’importe quoi. Sous-entendu, dès qu’un écrivain ou une écrivaine, surtout s’il ou elle publie en jeunesse, se rend dans une classe, ce serait pour mener un “atelier”. Or, c’est rarement le cas, au final. Il m’apparait important de définir chaque cas, afin que les attentes des enseignant·es et celles des auteurs et autrices ne soient pas complètement décalées !

Qu’est-ce qu’une RENCONTRE  ?

Il me faut avouer ici que la VRAIE raison de ce post, c’est que je souffre de voir ce joli mot dévoyé. “Entrer en contact ou en collision”, “nouer des relations”, nous indique le Larousse. Se rencontrer, c’est échanger des paroles, des idées, des sentiments. Et cela peut être très fort.

Mais surtout, lorsqu’un écrivain ou une écrivaine vient en classe, la rencontre est, en plus, LITTÉRAIRE. Il s’agit donc de la rencontre entre celui ou celle qui a écrit le livre + celles ou ceux qui l’ont lu + le livre lui-même.

Trois entités.

Le roman fait le lien entre les uns et les autres.

L’enjeu est donc de parler du roman (et s’il reste du temps, du métier d’écrivaine, la chaîne du livre etc).

Et pour cela, les élèves doivent avoir une “posture de lecteur ou lectrice” : j’ai déjà expliqué cela ici, où je donne des pistes pour y parvenir.

Ce qui peut alors arriver de mieux à la discussion est de tourner en DÉBAT. Personnellement, c’est ce que je préfère.

Qu’est-ce qu’une MISE À L’ÉCRIT ?

De nombreux écrivains et écrivaines jeunesse, suite à la rencontre proprement dite, proposent une consigne d’écriture. J’en comprends l’idée : après avoir entendu parler d’écriture et de mécanismes d’écriture, certain·es élèves auront développé le désir d’écrire à leur tour. C’est bien, de le leur permettre.

Cette mise à l’écrit des élèves ne durera souvent pas plus d’1 heure, restitution comprise, s’il y en a une. Il est évident que le temps d’écriture sera alors assez réduit. Le texte produit sera donc court aussi. Si on choisit de faire lire les productions, on aura peut-être le temps que chacun lise son texte, mais on n’aura souvent que celui d’écouter quelques volontaires, face au groupe entier, ou au sein de groupes de confiance.

Si la consigne est bonne, il y a de fortes chances pour que les textes dans leur premier jet soient drôles, surprenants ou émouvants, une réussite en soi, et un beau moment de partage au moment de leurs lectures, mais il n’y aura pas de temps pour les retravailler et les améliorer. Même oralement, le ou la professionnelle qu’est l’écrivain ou l’écrivaine ne pourra que peu faire profiter les élèves de son expertise. Et les autres élèves auront peu le temps de réagir aux lectures.

La plus-value de cette mise à l’écrit par un ou une professionnelle de l’écrit ne se situera donc pas là, mais dans le choix d’une consigne en rapport avec le livre dont il aura été question lors de la rencontre, manière de le faire vivre + dans la manière de donner cette consigne (la fougue de l’écrivain·e n’est pas négligeable pour générer l’étincelle !).

L’objectif est alors essentiellement de produire l’étincelle pour FAIRE ÉCRIRE. On permettra peut-être ainsi aux élèves de débloquer leur écriture, d’éprouver le plaisir d’écrire, d’exprimer le jamais exprimé, ou de s’amuser avec l’écrit, ce qui est formidable et beau. Mais, puisque le retour “critique” sera réduit, et qu’il n’y aura pas de réécriture, l’objectif n’est alors pas de conduire les élèves vers une approche littéraire de l’écriture.

Or selon moi, un “atelier d’écriture” mené par un écrivain ou une écrivaine doit comporter une plus-value littéraire. Sinon, il ou elle provoque “juste” une mise à l’écrit.

☞ Bien entendu, une mise à l’écrit peut se muer en atelier si le travail avec l’écrivain·e se poursuit à distance, avec le concours de l’enseignant·e.

Qu’est-ce qu’un ATELIER D’ÉCRITURE ?

J’ai une haute idée des ateliers d’écriture !

Et je souffre aussi de voir ce terme dévoyé (oui, j’ai le sens du mot juste… je suis écrivaine ;-))

Il y a tant et tant de manières d’en mener un qu’il faut bien 2 journées entières de formation, au moins, pour en faire un tout petit peu le tour 😉

Et si on veut le faire bien, en tant qu’écrivain·e, on a besoin a minima de 2 heures devant soi, avec la classe que l’on veut faire écrire.

L’idéal, selon moi, étant de le mener sur plusieurs séances.

Lorsqu’on est écrivain ou écrivaine, on va généralement donner une consigne en lien avec ses romans, mais ce n’est pas obligé. En tout cas il faut avoir sérieusement réfléchi à ce que l’on va demander aux élèves d’écrire, car dans certains cas il n’y aura pas besoin de restitution face au groupe (voire il n’en faudra pas), mais souvent, avec des enfants ou ados, elle sera nécessaire, sous forme de lecture à voix haute, et/ou de publication locale, et/ou d’exposition, etc.

Il faut aussi se demander si le but, c’est d’écrire un texte “efficace”, que ce soit au niveau esthétique ou communicationnel, auquel cas il faudra réécriture, et donc aide à la réécriture.

Mise à l’écrit + restitution + aide à réécriture + réécriture prennent beaucoup de temps, et cela même si on se passe de l’étape restitution ou de l’étape réécriture. Cela s’apparente parfois à un véritable chantier ! Pour moi cela va parfaitement avec le mot “atelier”, qui évoque l’idée d’artisanat, de faire et de refaire, et de bien faire… Si l’atelier est mené par un écrivain ou une écrivaine les élèves bénéficieront de conseils précieux pour cela.

POUR CONCLURE…

Ce distingo que j’opère ne concerne que les écrivaines et écrivains, un cas très spécifique. Les autres animatrices ou animateurs d’ateliers d’écriture n’ont évidemment pas à avoir d’exigence littéraire lors de leurs ateliers d’écriture. Pour eux cela n’a donc pas de sens de parler de “mise à l’écrit” au lieu d’”atelier” puisque c’est ce qu’ils et elles font toujours.

Me concernant, j’adore faire des rencontres, au sens donné ci-dessus, j’adore lorsque les enfants ou les ados s’enflamment et que cela tourne en débat, et surtout j’adore que pendant 1h à 1h30 on parle littérature contemporaine. C’est si rare en milieu scolaire.

J’aime beaucoup aussi mener des ateliers d’écriture, lorsque je bénéficie du luxe de pouvoir le faire sur 5 ou 6 séances de 2 ou 3h. C’est si énergivore et chronophage que je n’en accepte pas plus d’un par année scolaire. C’est un choix très personnel. Beaucoup font autrement, et c’est tout aussi respectable.

Ce qui est aussi très personnel, c’est que je fais rarement de mise à l’écrit suite à une rencontre… sauf si l’enseignant·e me le demande. Pourquoi ? Parce que je sais, en tant qu’ex-enseignante, que les profs savent souvent très bien faire ça, en ayant plus de temps pour le faire ! Si vraiment la classe est mutique et que la rencontre tourne court, je préfère leur lire un extrait d’un de mes romans…

Voilà, j’espère vous avoir donné matière à méditer.

Et à bientôt pour de nouvelles réflexions sur le métier !

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