Tous les soirs, je lis à mon fils des livres empruntés à la bibli. C’est souvent à l’aveuglette qu’on les choisit, et c’est ça qu’est bien à la bibli. On se demande jamais : est-ce que j’en aurai pour mon argent ?

Alors forcément, on tombe parfois sur des OVNI, choisis uniquement pour la couverture, sans avoir feuilleté.

Ce fut le cas de ce bouquin-là, lu hier soir :

Dès la première page, on devine qu’il s’agit d’une traduction (du néérlandais), non parce qu’elle est mal faite (au contraire !), mais parce que la liberté de ton est à des années lumière de ce que se permettent les (disons surtout ce que l’on permet aux) auteurs jeunesse français (je précise : pour plus petits ; pour ados la liberté de ton est grande, heureusement).

Petit lapin stupide a une question dans la gorge, qui doit sortir, aux côtés de Vieux Lapin. Mais il a a peine formulé le début de sa phrase que Grand Lapin lui crie : « Ta gueule ! » (voilà une insulte que vous ne trouverez jamais dans un album jeunesse français, vous pouvez me croire). Le ton est donné, pour la violence du propos. Par la suite, cette violence est toujours présente, non par le vocabulaire, qui devient au contraire très poétique, mais par le thème. Petit Lapin Stupide sort et pose sa question à plusieurs animaux mourants ou qui désirent la mort : « comment ça fait quand on est mort ? ». C’est très perturbant pour le parent lecteur, car à chaque fois la mort est vue comme une délivrance et comme quelque chose de doux, beaucoup plus doux que la vie de ces animaux-là. Mais c’est, au final, pour mieux accepter l’agonie de Vieux Lapin, et pour la lui faire accepter mieux.

Évidemment, dès le premier gros mot de la première page, mon fils a fait une drôle de tête, il s’est mis en arrêt, lèvres rentrées, yeux immenses. Puis dès la seconde page, il a dit : « mais en fait, il est pas du tout stupide, ce lapin… », puis il a écouté religieusement (oui, le mot est bien choisi). Pour finir, il a juste dit : « c’est comme Grand-Papy », son Grand-Papy décédé l’été dernier. On a éteint la lumière, et il s’est endormi.

Difficile de savoir ce qu’il en a compris, ou ce qu’il en a retenu.

Ce que je sais, c’est qu’il a bien dormi.

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2 Commentaires
  • florence
    30 juin 2012

    On avait bien aimé aussi tes chocolats ensorcelés !

  • Doinet
    30 juin 2012

    Comme tu as bien restitué ici ce tendre et unique moment, ce temps de l’histoire du soir, où un fiston écoute sa maman lui lire une mini fiction qui quelque part se mêle à la sienne, il y a vraiment des heureux hasards, des petits instants rares…Mymi