Retour du salon du livre de La Ferté-Bernard ! Classes très bien préparées et intéressées, enseignants passionnés et logistique impeccable de la part des organisateurs. Merci beaucoup à Loïc, Sylvia, Stéphane, Gaëlle et tous les autres. J’ai été très contente de revoir, comme à chaque fois, Carl Norac et Gilles Bachelet, et ce fut avec plaisir que j’ai revu ou fait connaissance avec d’autres belles personnes créatives : auteurs, illustrateurs ou bédéistes. Merci également pour les messages sous forme de tweets des élèves, pour leurs exposés, leurs saynètes, et pour leurs sourires et regards pétillants.

(Jolie boîte à tweets, autour de mon roman L’été où je suis né)

Mais je l’avoue (dois-je en avoir honte ?), malgré tous ces bons moments ponctués de délicieux toasts aux rillettes du Mans, je n’avais qu’une hâte : pouvoir me retrouver au calme pour finir de lire mon roman en cours. C’est tout le pouvoir des livres !

J’ai donc terminé avec avidité un gros pavé : Purity de Jonathan Franzen.

 

J’ai voulu le lire car j’avais lu quelque part qu’il parlait de transhumanisme, thème qui m’intéresse, mais en réalité il n’en a été question que de la page 640 à la 643. J’ai alors pensé à Mon Grand Saut et à cette chose bizarre : certains ont dit que j’avais voulu y parler de djihadisme… alors que mon roman ne contient en tout et pour tout qu’une réplique provocatrice à ce sujet… Purity, ainsi, ne parle pas du tout de transhumanisme, mais  de la lutte entre journalisme classique et lanceurs d’alertes sur des plateformes du genre de wikileaks, il parle de mères folles et de pères absents, d’émancipation familiale et historique, d’argent et de choix radicaux, de meurtre et de pureté criminelle, de mensonges et de Vérité. Et simplement il prend la liberté de raconter une histoire, juste une histoire, qui gravite pour beaucoup à Berlin,  se baladant sur le fil du temps et sur la crête du Mur (étrange que je me sois retrouvée à Berlin en vacances improvisées, pile quand j’ai compris que ce roman s’y situait). Il est d’une densité qui est celle de la vie. Ce roman m’a plu aussi parce que Franzen se met dans la peau de plusieurs personnages qui chacun raconte sa version, et j’adore les récits choraux ou polyphoniques. Le style est d’une extrème simplicité, sans esbroufe (à part quand c’est un aspirant écrivain qui raconte sa partie, et le changement de style, presque ampoulé, est très bien vu). Et surtout, c’est un véritable page-turner, qui m’a tenue en haleine, avec ce vrai plaisir de lecture qui fait juste espérer un moment de libre pour le retrouver. Je n’oublierai pas de sitôt Purity (dite Pip comme dans Les Grandes Espérances), ni Andreas Wolf en double troublant de Julian Assange.

 

Juste avant, j’ai lu un autre excellent roman, qui m’a aussi tenue en haleine, peut-être même davantage. Il s’agit de D’après une histoire vraie de Delphine de Vigan.

 

De Vigan connaît ses classiques, et ne vous y trompez pas, dans ce roman-ci il s’agit des oeuvres de Stephen King ou de Chuck Palahniuk, même si les romans cités, ceux que lit l’héroïne, sont issus du mainstream français. C’est ce mélange et cette absence de frontière élitiste que j’ai beaucoup aimés. Avec audace, elle n’hésite pas à jouer la carte de l’autofiction à la Christine Angot, pour mieux le tordre et l’interroger. C’est une réflexion passionnante sur ce qu’est un écrivain, ce que c’est d’écrire, ce que c’est de s’exposer. Mais aussi ce que c’est de jouer avec son lecteur, aussi bien et même mieux que ne se trouve (ou ne se croie) manipulée la narratrice. C’est tout le génie de ce livre : le trouble qu’il inspire, les frontières entre le réel et la fiction qui bougent, s’effondrent, se reconstruisent, dansent et explosent. Quand on est écrivain soi-même, c’est encore plus fascinant. On peut tous connaître, dès qu’on a un tout petit succès, ces personnalités à l’abord amical à première vue, mais très inquiétant par la suite – mais l’inquiétude ne vient-elle pas du doute que nous avons alors d’être apprécié simplement pour soi-même ? On ne peut alors qu’interroger la réalité. C’est donc un roman passionnant, d’une maîtrise bluffante, doublé d’un immense plaisir de lecture. Un coup de maître.

Encore avant j’avais lu Petit Pays de Gaël Faye.

 

 

Je dois avouer une légère déception après tous les éloges que j’en avais lus. Le style en est très simple et j’en attendais peut-être quelque chose de plus « écrit », en tout cas un style qui m’aurait davantage emportée. Mais cette simplicité a peut-être été choisie pour coller avec un récit qui reste la plupart du temps à hauteur d’enfant, même si c’est l’adulte qui se souvient et qui raconte. J’ai  été très intéressée par cette histoire qui plonge peu à peu mais inéluctablement dans le génocide des Tutsis au Rwanda et au Burundi. Cette histoire liée à la famille du narrateur est poignante, racontée sans pathos, avec immensément de pudeur et un recul remarquable, et courageux. La fin est très belle et terrible, bien trouvée (bien amenée si elle s’inspire du réel), et très romanesque. C’est ce sens du romanesque, que l’on sent dans ce premier roman, qui apparaît extrêmement prometteur.

Pour me documenter afin d’écrire mon roman en cours, j’ai lu Patients de Grand Corps malade, sans savoir qu’il avait été adapté en film, je l’ai su juste avant sa sortie.

 

 

J’ai en effet appris pas mal de choses sur la vie en centre de rééducation. Je pense que ce roman n’a rien de présomptueux et GCM n’avait pas d’autre prétention que d’apporter un témoignage, je crois. On y découvre le sens des mots et le plaisir de les manier, qui se retrouve dans ses textes de rap, mais il y manque un peu ce sens du romanesque qu’a Gaël Faye. Cela donne un livre plaisant, intéressant, et plein de vie et de dérision, voire d’humour.

Et enfin j’ai lu le premier livre de mon grand ami Adda, également sur le thème du handicap, Comme sur des roulettes.

 

 

C’est un bonheur de retrouver par écrit sa verve et sa légèreté, son auto-dérision, son humour et son positivisme. Ce récit a quelque chose de beaucoup plus touchant que Patients et d’encore moins présomptueux, d’abord parce qu’il ne se finit pas « bien », dans le sens où le narrateur ne guérit pas, même partiellement, ensuite parce qu’il recèle une philosophie de vie mieux ancrée et plus vivante. C’est un récit sans doute plus maladroit que Patients, mais en cela plus intéressant, car échappant à tout attente et à tout stéréotype. En bref, j’ai préféré sa posture, avec l’unique prétention d’échapper une bonne fois pour toutes aux regards trop insistants ou dérangeants. Posture digne, courageuse, souvent drôle, et surtout non dénuée de charme.

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2 Commentaires
  • Nancy
    6 mars 2017

    Très heureuse de t’avoir rencontrée Florence.
    Je te souhaite de très beaux succès encore (et de belles lectures).
    Au plaisir de te recroiser à nouveau !

    • FH
      6 mars 2017

      Merci Nancy, de même ! Très belle continuation à toi.