On a beaucoup lu dans la presse que le Solenoïde de Mircea Cartarescu (éditions Noir sur blanc) était un chef d’oeuvre. Or, c’est vrai. Il a aussi été qualifié d’oeuvre monumentale ou encore d’OVNI littéraire. C’est vrai aussi. Ce roman comporte des pages absolument sublimes et inoubliables. On a parlé d’influences issues de Kafka, Swift ou Borges, et la force visuelle, la truculence et l’extraordinaire de certaines scènes font aussi penser au Brazil de Terry Gilliam ou au Chat noir chat blanc d’Emir Kusturica. Certes, le roman est un pavé, et nos vies actuelles rendent difficiles ces lectures au long cours, on est hélas devenus impatients face à de trop longues descriptions ou digressions, même si elles sont toutes, absolument toutes, d’une grande beauté, mais il faut vivre l’entrée dans Solenoïde comme l’immersion dans un gouffre immense qui jette hors de toute normalité, superficialité, médiocrité, et ma foi on en a grand besoin ces temps-ci.

En tant qu’écrivaine j’ai été bluffée, jalouse et admirative de l’apparente facilité de l’auteur à raconter tout ce qu’il choisit de raconter avec une précision et une fluidité étonnantes. On est happés par un style unique et surtout parfaitement maîtrisé, qualité rare que je recherche de plus en plus et qui me rend très difficile dans le choix de mes lectures. Impossible à ce stade de ne pas parler du travail de la traductrice Laure Hinckel (oui oui c’est ma soeur mais je vous assure que si ç’avait été une autre j’aurais dit pareil), qui a réussi cet exploit titanesque de restituer toute la beauté de cette oeuvre, là aussi avec cette apparente facilité qui est la marque de celles et ceux qui maîtrisent ce qu’ils et elles font, et qui ont une réflexion profonde sur leur mission (lire son blog La part des anges pour comprendre de quoi je parle). Et pour y parvenir il faut un grand talent, car il y a un moment où beaucoup travailler ne suffit plus pour s’élever.

L’un de mes passages préférés

De quoi ça parle ? J’avoue ne pas en être encore à la fin mais j’en suis proche donc je peux vous dire que c’est le journal d’un homme qui a raté sa carrière d’écrivain et qui raconte son quotidien, qui se révèle très loin d’être ordinaire. Folie ou réalité ? Peu importe, cet extraordinaire raconte beaucoup de choses, au fil de rencontres marquantes et d’excursions dans des lieux épiques. C’est comme un puzzle ou une chasse au trésor dont le but serait de trouver comment s’extirper d’une normalité tuante. Détail qui a son importance : cela se passe dans une Bucarest qui paraît avoir sa vie propre et un coeur battant, sous des dehors austères.

Ainsi donc il serait dommage de passer à côté d’une telle expérience de lecture tout à fait singulière. Et vous savez quoi ? On peut à nouveau commander et acheter des livres en librairie ! Alors, c’est le moment.

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